OLJ / le 16 février 2021
L’armée s’est interposée hier entre les manifestants en colère et un motard qui les avait insultés devant le tribunal militaire. Photo Mohammad Yassine
Une centaine de manifestants se sont rassemblés de nouveau hier en milieu de journée devant le siège du tribunal militaire à Beyrouth, pour réclamer la libération d’une vingtaine de militants détenus, originaires notamment du Liban-Nord et de la Békaa.
Comme depuis le début de ces manifestations, lancées il y a plusieurs jours maintenant, les forces de sécurité et l’armée ont coupé les routes menant au tribunal militaire situé dans la zone du musée, et établi un cordon de sécurité autour du lieu du rassemblement ainsi que des barbelés. Elles étaient équipées de canons à eau.
Les manifestants, venus de la Békaa-Ouest, Saïda, Tripoli, du Chouf et, évidemment, de Beyrouth, ont scandé des slogans révolutionnaires. La plupart se réclament de la mouvance du mouvement de contestation du 17 octobre. Les militants arrêtés font partie d’un mouvement de contestation lancé à Tripoli en janvier, visant à protester contre le confinement prolongé destiné à endiguer la progression du coronavirus. Ils estimaient que la fermeture générale empêchait les travailleurs journaliers de gagner leur vie, alors que l’État ne leur offre aucune aide. C’est durant l’une de ces manifestations que le siège de la municipalité de Tripoli a été incendié le 28 janvier. Les arrestations de militants se sont alors multipliées, mais leurs camarades affirment qu’il s’agit de répression et que les personnes arrêtées ne sont pas coupables des actes de violence en question.
Le rassemblement, pourtant pacifique, ne s’est pas déroulé sans incidents hier. Un homme à mobylette est passé devant les manifestants, les insultant et prenant à partie l’intégralité du mouvement de contestation du 17 octobre. Les protestataires lui ont couru après, scandant des slogans contre le chef du législatif Nabih Berry et la « dahyé », la banlieue sud sous contrôle du Hezbollah. L’armée a séparé les contestataires de l’homme en question, afin d’empêcher un éventuel dérapage.
Sur place, l’avocat Charif Sleiman, qui défend quelques-uns des militants arrêtés, a affirmé à notre correspondant Mohammad Yassine qu’au total, le juge avait interrogé sur trois jours 24 militants, dont quatre ont été relâchés, et qu’il devait encore en interroger deux autres hier. Il a déploré que la loi qui régit les gardes-à-vue ne soit pas respectée, et que les 48 heures réglementaires soient souvent dépassées, les interrogatoires se faisant à un rythme trop lent.
L’avocat a par ailleurs précisé que l’un des détenus est atteint du coronavirus et a été placé en quarantaine. Selon lui, les autorités ont promis aux familles des militants détenus de leur donner la possibilité de les rencontrer les lundis et jeudis. Certains proches avaient fait le déplacement hier, mais n’avaient pas encore pu rencontrer leurs enfants.